Buzy - Concert La Boule Noire (Paris) 2005

Buzy - Interview 2006

Buzy - Interview 2007




Interview

Buzy - Interview - Pierre Derensy


Il y a parfois des injustices qui sont difficiles à surmonter pour un passionné de musique. A croire que les oreilles du public ne sont pas remplies de merde comme le prétendent certaines dans des pseudo émissions de radio-crochet mais tout du moins que ce fameux mélomane est dyslexique : c’est à dire qu’il lui faut passer par le livre pour écouter ensuite la voix de la raison et l’album qui résonne. Buzy est le cas classique d’une chanteuse merveilleuse qui doit enfoncer le clou pou faire taire les critiques et imposer sa musique. La ré-édition de son autobiographie accompagnée de son dernier album devrait, si « justice du beau » doit lui être rendu, cartonner sur les étales des libraires et raisonner dans les meilleurs platines. En 2007, je vote pour la voix royale de Marie-Claire.

Pierre :
« Engrenage » + « Borderlove » dans un package c’est une idée fantastique parce qu’à écouter « Borderlove » on se rend compte que ce sont tous les thèmes « d’Engrenage » mis en musique ?
Buzy :
C’est suite à l’écriture du livre que j’ai eu envie de me remettre à l’écriture de chansons et reprendre mon aventure musicale. Donc évidemment il y a une espèce de résonance entre les thèmes abordés des deux côtés.
Pierre :
Avez-vous retouché le manuscrit avant la ré-édition ?
Buzy :
Non Pourquoi ?
Pierre :
Parce que je trouve que vous avez un sacré don médiumnique et divinatoire, vous pronostiquiez pas mal de choses il y a 2 ans qui se sont avérées réelles ces temps ci ?
Buzy :
J’ai toujours été comme ça. Même quand j’étais enfant mes parents me faisaient taire car je leur faisais peur (rire). Quand j’avais 18 ou 19 ans je tenais des discours à mes potes sur ce qui allait se passer 10 ans plus tard.
Pierre :
Sinon, comment expliquez vous qu’il n’y ait pas de solidarité féminine dans la musique ?
Buzy :
Ce n’est pas une question de sexe ! Il n’y a pas de solidarité tout court dans la musique !
Pierre :
Mais on vous sent quand même beaucoup plus proche des hommes ?
Buzy :
Oui mais ça c’est par nature… j’adore les femmes mais je m’entends mieux avec les garçons.
Pierre :
La première fois que l’on s’est parlé je vous avez comparé à Joe Strummer…
Buzy :
Ho oui ! vous m’aviez fait tellement plaisir ! j’ai frimé avec ça, j’ai forwardé votre article à tout le monde en leur disant maintenant rentrez chez vous ! (rire)
Pierre :
Cette foi j’aimerais souligner le côté rockeuse française charismatique !
Buzy :
C’est vachement gentil !
Pierre :
Oui mais alors pourquoi êtes vous toujours seule dans ce paysage et ce costume ?
Buzy :
Je ne sais pas. Je suis en pleine crise là actuellement (rire). Je suis à nouveau en psychothérapie et je me pose en permanence la question. Je crois que l’artiste duquel je me sens le plus proche et là je parle de l’écriture : c’est Bashung qui est un mec seul mais qui lui appartient à une famille. Tandis que moi mon parcours me donne l’image du vilain petit canard car j’ai fait des tubes, qui plus est jeune et qu’on me les a fait payer très cher ces cartons !»
Pierre :
En même temps on peut aussi parler de « Borderlove » comme un album de variété classieuse plutôt que de rock ?
Buzy :
Tout dépend de ce que vous mettez dans le terme «Rock ». Si c’est simplement parce qu’il y a des guitares les gens de la star-academy en mettent aussi ! Le rock à une certaine époque c’était un état d’esprit… dorénavant je me pose la question. C’est devenu extrêmement mercantile. Il faut mettre les artistes dans des créneaux. A votre avis, quelle est la grande différence entre Alain Chamfort et Jean-Louis Murat ?
Pierre :
Je ne sais pas, peut être que l’un est plus médiatique que l’autre ?
Buzy :
Chamfort à un passé de variété produit par Claude François en ayant remonté le tir car son rêve c’était les inrocks etc mais il reste malgré tous ses efforts, un artiste de variété élégante tandis que Jean-Louis Murat c’est positionné dès le départ comme quelqu’un faisant du rock. Mais les deux, l’un à côté de l’autre : il n’y a pas grande différence. Les deux personnes ont du talent. Point final.
Pierre :
Vous écrivez de très belles pages sur votre grand-mère, n’est ce pas la seule et unique personne qui ne vous ait jamais jugé et uniquement aimé d’un amour total ?
Buzy :
C’est la seule effectivement…
Pierre :
C’est son éducation qui a fait que vous n’avez jamais su tricher dans le métier ?
Buzy :
Oui, c’est une femme qui a vécu deux guerres, elle s’est retrouvé veuve très jeune avec deux enfants sur les bras. Elle a du lutter pour les élever loin de son parcours artistique de pianiste. Ma grand-mère a toujours gardé une sorte d’honnêteté par rapport à la vie. De simplicité aussi et surtout une capacité à rêver…
Pierre :
Vous avez une image de femme urbaine qu’on ne voit pas aimer la nature, le coté « roots » alors qu’en définitive vous êtes une petite fille de province qui aime les arbres et les oiseaux ?
Buzy :
Les arbres c’est une folie furieuse chez moi ! enfant je montais dessus et maintenant j’en ai plein partout dans mon appartement. Enfin je monte plus dessus je suis trop lourde (rire). Je suis très sensible à tout ce qui touche à la végétation.
Pierre :
Finalement quand on referme le livre, on se dit que vous avez eu la chance de percer juste après le punk quand tout était possible et finalement ce fut aussi votre plus grand malheur car tous ces rebelles se sont retrouvés au pouvoir pour imposer des règles qui ne vous convenaient pas ?
Buzy :
Oui c’est vrai mais même ceux d’avant me bottaient moyennement. Toutes ces personnes militantes de mai 68 promettant une libération culturelle et qui sont complètement entrer dans le système et qui sont tous aussi pourries que les autres.
Pierre :
Comment se porte le bébé « Borderlove » ?
Buzy :
Avec des hauts et des bas.
Pierre :
L’installer avec le livre, c’est lui donner une deuxième chance ?
Buzy :
L’équipe autour de moi a considéré que la sortie n’avait pas été bien faite car il fut dans les bacs avec un nombre de disques phénoménal au mois d’Octobre. Là c’est lui donner une exposition nouvelle qui je l’espère lui permettra de trouver son public.
Pierre :
Vous sentez vous prête à retourner au combat si l’album n’a pas d’échos auprès du public ?
Buzy :
D’après le directeur marketing qui s’occupe de moi je dois me remettre à l’écriture illico presto pour enfoncer le clou et continuer coûte que coûte mais moi je suis très fatiguée et je ne peux pas écrire pour écrire. Je ne suis pas Barbelivien, je n’y arrive pas, je dois vivre des choses, avoir une urgence et pour l’instant ce n’est pas le cas.
Pierre :
Je vais vous faire une petite confidence : je suis certain que vous n’êtes faite que pour chanter et pour voler dans les airs ?
Buzy :
Voler ce n’est pas évident tous les jours… chanter non plus (rire). Chanter j’aurais besoin de faire de la scène, trouver un tourneur qui plonge en me suivant. On essaye de mettre en place une formule acoustique plus viable sur le plan économique.
Pierre :
Le truc qui cloche c’est que vous avez l’image d’être ingérable alors que je peux certifier que vous êtes charmante et on ne peut plus professionnelle !
Buzy :
Tout ça ce sont des conneries. Ce sont des trucs qui remontent aux années 80. J’ai toujours fait ce qu’on me demandait sauf si on m’envoie dans des trucs coupe-gorge, je suis parfaitement capable si on me pose une question insultante de me lever et de quitter le plateau. Je ne veux pas rentrer dans ce système de béni oui oui.
Pierre :
C’est pour ça que tous les gens qui vous rencontrent vous adorent aussi !
Buzy :
Oui mais pour certains médias je ne suis peut être pas assez destroy comme Daniel Darc, je n’ai pas un passé junkie donc on ne peut pas potentialiser là dessus. Je ne sais pas ce que je dois faire, peut être me foutre à poil dans la rue et que j’appelle des paparazzis ?(rire)
Pierre :
Marie Claire, je pensais que notre prochaine interview parlerait de ce fameux best-of qui était prévu pour février, mars 2006 alors qu’est ce qui s’est passé ?
Buzy :
Ce projet est repoussé pour ne pas phagocyter les ventes de «Borderlove». L’affaire est de nouveau sur le terrain pour Novembre ou Décembre. J’ai déjà trouvé quelqu’un pour un DVD sur tous les clips.
Pierre :
Puis je vous donner une idée : pourquoi ne pas compiler vos chansons sur un premier CD et surtout enregistrer tous vos tubes avec votre voix actuelle et une orchestration acoustique sur un second opus ?
Buzy :
Moi je trouve votre idée vachement bien. C’est vrai que c’est vraiment dur de faire une compilation avec mes chansons car lorsqu’on prend mes premiers titres et qu’on les met à côté de ceux actuels on a l’impression que j’ai peut être eu une mutation hormonale ! (rire)
Pierre :
En même temps ça pourrait être sympa de montrer l’évolution ?
Buzy :
Vous auriez deux chanteuses différentes. Vous en auriez deux pour le prix d’une !
Pierre :
Alors pour terminer, qu’est ce que vous aimeriez changer dans votre vie professionnelle, quel engrenage auriez vous pris la peine de mieux huilé si c’était à refaire ?
Buzy :
La vie est faite de 36 000 engrenages. L’engrenage du caractère, de ce métier, du rouage amoureux. Je ne sais pas lequel choisir. Peut être celui de cette société qui devient folle. Je changerais les mentalités, la peur qui envahit tout le monde, l’individualisme forcené. La polarisation sur le mal.
Pierre :
Comme vous aimez les arbres, si je vous laisse semer une phrase pour finir cette interview ?
Buzy :
Il faudrait qu’on ressemble tous à des arbres ! Parce qu’il n’y a rien de plus beau. Ce qu’il y a de formidable c’est qu’ils poussent vers le ciel !